Il n’est pas le plus haut de la région, ses 61 mètres ne pouvant rivaliser avec les 75 mètres de celui d’Arras. Mais les Douaisiens l’affirment haut et fort : le beffroi de Douai, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, est le plus beau de tous. C’est vrai que la tour en grès surmontée d’une élégante flèche a sacrément de la gueule ! Et que le beffroi, construit dès 1380, n’a pas changé depuis 1475 ! La visite guidée permet d’en découvrir tous les petits secrets mais aussi de monter au sommet. Et même, pourquoi pas, de s’installer au clavier du carillon et de tenter une petite mélodie. Quitte à casser les oreilles à toute la ville…
J’ai tâtonné, j’ai joué faux et au final j’ai rigolé en me disant que tout Douai profitait de cet épouvantable concert. Mais le carillonneur m’a rassurée : « C’est pas grave. Les Douaisiens ont l’habitude qu’on malmène ainsi leurs oreilles ».
Une petite indiscrétion pour commencer. Vous pensez ne rien connaître du beffroi de Douai ? Vous devez faire erreur. À mon avis, vous avez déjà entendu son carillon. Où ? Dans le cultissime film Bienvenue chez les Ch’tis. Je fais erreur, le film a été tourné à Bergues ? Eh bien non. Si les images extérieures de la célèbre scène du beffroi ont été tournées à Bergues, c’est bien le carillon de Douai qu’on entend.
Ceci étant dit, revenons à notre visite guidée. Tout commence au rez-de-chaussée, où on découvre notamment la ville ancienne en déambulant sur une photo du plan-relief de 1709.
Quelques jours après l’inauguration de la salle des plans-reliefs rénovés au Palais des Beaux-Arts de Lille (lire l’article en cliquant ici), il n’est pas inutile de préciser que le plan-relief original de Douai n’est pas dans la capitale des Flandres mais à la Chartreuse de Douai. Encore un motif de satisfaction pour nos fiers Douaisiens, je suppose…
Si ce plan-relief date de 1709, le beffroi, lui, est beaucoup plus ancien. Il a en effet été construit en 1380, en plein Moyen-Âge, alors que Douai était une importante ville drapière. Comment devine-t-on que la cité se portait bien à cette époque ? Son beffroi a été construit en grès, un matériau très onéreux en ce temps-là.
Une ville riche donc mais aussi hérissée de clochers. On l’appelait d’ailleurs la ville aux cent clochers…
Le beffroi de Douai, qui aime jouer les stars, apparaît dans pas mal de tableaux et de dessins.
Il trône ainsi au centre de La Famille du Grand Gayant de Douai, peint en 1780 par Louis Watteau. C’est rigolo mais je crois bien que le peintre s’est posté à l’endroit exact où je me suis mise pour faire ma photo, celle qui sert de photo d’accueil à cet article.
De passage dans le Nord, Victor Hugo l’a également dessiné à la mine de plomb, en 1837. Tandis qu’un peu plus tard, Camille Corot l’a représenté sur sa célèbre toile au nom follement original : Le Beffroi de Douai.
Allez, courage, on commence à grimper les 195 marches. Ah, parce que vous pensiez qu’il y avait un ascenseur ? Faut pas rêver.
On fait une pause au premier étage, dans la salle des gardes. La grande cheminée est toujours là, ainsi que les bancs sur lesquels les gardes en question s’installaient quand ils étaient de faction. Tandis qu’au mur, preux chevaliers et belles dames font revivre le Moyen Âge, sous l’œil placide de personnages de pierre.
Ne manquez pas, dans la vitrine, la charte communale de Douai (ou plutôt son fac-similé, l’original étant aux archives communales), rédigé en latin, sur du parchemin. Datant de 1213, elle définit les libertés de la ville et les pouvoirs de ses échevins. Elle donne notamment le droit de frapper monnaie mais également de posséder ses propres cloches. Du coup, on construit un beffroi, qui n’est rien d’autre qu’une tour de l’hôtel de ville, pour abriter les cloches communales.
Pour tout vous dire, j’ai préféré me plonger dans ce texte en latin ( même si je ne comprends pas un traître mot…) plutôt que de regarder de l’autre côté de la salle. Au centre, le plancher est en effet transparent, surplombant la photo du plan-relief du rez-de-chaussée. À l’origine, il y avait là un grand trou, permettant de monter les cloches aux étages supérieurs.P
Encore un étage et nous voici dans la salle des sonneurs. Au Moyen Âge, une trentaine de cordes arrivaient là, qui permettaient de sonner les cloches. Sur ce beffroi miniature, cette salle se trouve à peu près au milieu de la tour, au niveau du cercle encadré…
Quelques marches de plus (on en a monté 153 depuis le départ) et voici le troisième étage, celui du carillon et du carillonneur. Le carillon de Douai, l’un des plus grands d’Europe, c’est 62 cloches. La plus grosse, appelée aussi bourdon, ne loge pas avec les autres. Joyeuse (c’est son nom) crèche en effet toute seule au quatrième étage. Il est vrai qu’avec ses 5500 kg, la vieille dame (elle est née en 1924) a besoin d’un peu d’espace… Plus encore quand elle sonne à la volée à l’occasion des fêtes de Gayant. Elle bouge alors son gros corps de bronze à 90° !
Ce samedi matin là, gros coup de chance. Le carillonneur de la ville était présent pour faire ses gammes ou plutôt pour jouer ses petites ritournelles. On a donc pu l’entendre et surtout le voir jouer des poings sur le clavier.
Sympa comme tout, il nous a proposé de prendre sa place et de jouer à notre tour. Je n’ai jamais touché à un carillon de ma vie mais je me suis dit que c’était l’occasion. J’ai donc grimpé sur la banquette. Et j’ai joué un air méga basique, appris quand j’ai commencé le piano, il y a… une éternité. J’ai tâtonné, j’ai joué faux et au final j’ai rigolé en me disant que tout Douai profitait de cet épouvantable concert. Mais le carillonneur m’a rassurée : « C’est pas grave. Les Douaisiens ont l’habitude qu’on malmène ainsi leurs oreilles ». Ah bon. Ouf.
Restait alors à monter les 75 dernières marches pour admirer le panorama. Les échauguettes à poivrières, ces petites tours où se postaient autrefois les guetteurs, accueillent aujourd’hui les visiteurs. Malgré le temps gris de cette journée de février, j’ai beaucoup aimé la vue imprenable sur la cité de Gayant.
Surtout côté place d’Armes, là où j’ai fait ma photo d’accueil de cet article… et où Louis Watteau s’était posté pour peindre La Famille du Grand Gayant de Douai.
Voilà, restait maintenant à redescendre. 195 marches dans l’autre sens, le plus périlleux je trouve.
Petit tour par la boutique du rez-de-chaussée. Et coup d’œil aux costumes moyenâgeux accrochés juste à côté. Car oui, c’est la bonne idée du beffroi de Douai. Prêter un costume de chevalier, de damoiseau ou de noble dame pour faire l’ascension. Et pas qu’aux enfants puisqu’il y a aussi des costumes pour adultes. J’avoue que cela m’aurait bien plu de me déguiser ainsi… Mais l’idée de me prendre les pieds dans ma robe longue et de tomber tête première dans l’escalier, mon iPhone dernier cri (et surtout hors de prix) à la main m’a fait reculer. Mais je n’exclus pas de revenir, accompagnée d’une fillette (mais sans iPhone) pour tenter l’aventure…
P
Le beffroi de Douai en pratique
Visite tous les jours, sauf lundi matin, à 10 h 30, 11 h 30, 15 h et 16 h 30.
Visite supplémentaire à 17 h 30, en juillet et août.
Tarif : 6 € et 4 € réduit (- 18 ans, étudiants, demandeurs d’emploi, détenteur de la carte handicapé).
Durée de la visite : une heure.
Il n’y a pas d’ascenseur pour la montée.
Le rendez-vous pour les visites est fixé à l’office de tourisme, 70 place d’Armes, Douai.
douaisis-tourisme.fr
03 27 88 26 79.
J’ai été invitée pour la visite par Douaisis Tourisme.
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3 Commentaire(s)
Ça donne envie de gravir les 195 marches. Merci Anne pour cet article.
Oui, super visite. Et, en plus, on doit bien perdre quelques calories dans la montée…
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